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Bureau de l’adoption internationale

Francine Boidevaix

Denis Barbet m’accueille dans ses bureaux au premier étage de l’annexe du Quai d’Orsay, du Bd des Invalides, un bel endroit qui donne sur l’hôtel particulier du ministère des Outremer. Un grand sapin orné de boules multicolores se dresse à l’intérieur de l’hôtel de Montmorin, tout à fait d’actualité pour une mission vouée aux enfants. Dix sept agents y travaillent. Deux personnes sont mises à la disposition du service par le ministère de la Justice, son adjointe est une magistrate, et une provient du ministère des Solidarités. En ces temps de pandémie mondiale, l’adoption internationale se poursuit. C’est une aventure qui demande beaucoup de patience, d’inventivité et de solidarité.

« L’adoption internationale, précise d’emblée Denis Barbet, est la rencontre de deux histoires qui transcendent les frontières, un processus exigeant. C’est donc lorsqu’aucune autre solution ou meilleure alternative ne peut être trouvée dans le pays de naissance que l’adoption internationale peut être envisagée. Malgré les restrictions de déplacement, 215 enfants ont pu tout de même gagner la France en 11 mois.
En juin 2020, par exemple, 17 enfants sont arrivés d’Haïti avec leurs parents adoptifs. L’opération avait été mise en place avec la cellule de crise du Quai d’Orsay. J’ai une photo des nouveaux petits Français avec notre ambassadeur et la consule. C’est une joie de la regarder. Au Vietnam, en novembre dernier, la Délégation européenne, en liaison avec notre ambassade, nous a aidés à obtenir des titres d’entrée dérogatoire à titre humanitaire pour 4 familles françaises. Les parents ont dû se confiner pendant 14 jours dans un hôtel d’Hô Chi Minh-ville avant de retrouver leurs enfants. Hier après-midi, (le 15 décembre), nous avons réussi à réunir une famille à Haïti. La procédure a été complexe. Avec l’aide de notre consule à Port au Prince, les parents adoptifs ont accueilli le correspondant local de l’opérateur (l’organisme d’adoption), accompagné des enfants, dans la zone de transit qu’ils n’avaient pas quittée depuis leur atterrissage et sont repartis par le même avion qu’ils avaient pris à l’aller.
Les nouveaux parents pourront passer Noël avec leurs jumeaux. C’est gratifiant pour nous. Il ne faut pas oublier que les parents ont déjà séjourné plusieurs semaines et parfois à plusieurs reprises dans le pays d’origine pour rencontrer l’enfant et établir une relation de confiance. Ils sont arrivés à la fin d’un long processus.
 »

Une adoption internationale en déclin
On imagine la joie de ce Noël exceptionnel. Mais qu’en est-il de l’adoption internationale ces dernières années ?
« En 2019, 421 enfants ont été adoptés à l’étranger en France. Mais la baisse est régulière. Il faut comparer ce chiffre avec celui de 2010 : 3.500 adoptions. Les causes sont multiples. D’abord, ce qui est une bonne chose, car cela montre que la situation économique et sociale s’est améliorée, que des pays ont développé l’adoption nationale. Elle est plutôt tournée vers de jeunes enfants. Par contrecoup, les enfants adoptables à l’international ont généralement plus de 5 ans, peuvent faire partie de fratries de 2 ou 3 ou d’encore plus, avoir des soucis de santé. C’est le cas d’un peu moins de 70% des adoptés. La plupart du temps, les handicaps ou maladies peuvent être soignés en France et ne pas laisser de séquelles.  »

Les principaux pays d’adoption sont le Vietnam, la Colombie, la Thaïlande, le Congo Brazzaville, l’Inde, Madagascar. Haïti était le premier d’entre eux jusqu’au drame du 24 novembre 2019 :
« Cela a été une tragédie. Les parents, qui étaient venus pour adopter des jumeaux, ont été assassinés devant leur hôtel. Nous avons suspendu les nouvelles adoptions et poursuivons des démarches avec les autorités haïtiennes ».

Les fonctionnaires de la mission et leur chef ne restent pas dans leurs bureaux à piloter de loin les procédures. Ils voyagent beaucoup...en temps normal.
« Pour résumer, nous sommes l’autorité centrale, l’organe de régulation, de contrôle et de vérification des procédures d’adoption dans le respect de la législation française et de celle des pays d’origine. Nous sommes au contact de nos consulats pour autoriser la délivrance des visas long- séjour adoption. L’adoption internationale est encadrée par deux conventions, celle des Nations-Unies sur les droits de l’enfant de 1989 et la Convention de La Haye de 1993 que la MAI est chargée de faire respecter. Nous exerçons une action de tutelle stratégique sur l’Agence française de l’adoption, délivrons les habilitations et assurons le contrôle des organismes autorisés pour l’adoption ».

La mission travaille en étroite coopération avec 26 opérateurs privés comme la COFA, « Lumière des Enfants », « Amis des Enfants du Monde » et avec l’opérateur public, l’Agence française de l’adoption. Environ 20% des adoptions sont « privées » (sans accompagnement par un opérateur) et ont lieu dans des pays non signataires de la convention de La Haye de 1993, ce qui peut poser certaines difficultés.
« La procédure d’adoption n’est pas chose facile, me dit Denis Barbet, mais quelle joie à l’arrivée pour les parents et aussi pour nous. Il faut déjà environ dix mois entre le moment où les familles obtiennent l’agrément du conseil départemental de leur résidence après une enquête sociale et choisissent un opérateur sur le site internet de la MAI. Puis l’opérateur transmet les dossiers des candidats à l’autorité centrale du pays souhaité pour l’adoption. Avant de donner notre accord, il faut vérifier si l’enfant est vraiment adoptable et si les conditions de son adoption sont bien réunies. Nous suivons avec l’opérateur toutes les étapes, puis les parents déposent une demande de visa adoption auprès de l’un de nos consulats avec les documents requis que nous examinons avant d’accorder éventuellement notre feu vert. »

Aller voir sur place
Une grande partie du temps de Denis Barbet et de son équipe est aussi consacrée aux missions à l’étranger. « Nous rencontrons nos homologues des pays d’origine et nous nous faisons une idée, bonne ou mauvaise, du système de protection de l’enfance et des maisons d’enfants. Nous en discutons ensuite avec les opérateurs. Parfois, ce sont eux qui nous signalent des situations difficiles. Il est arrivé que nous ayons eu à informer notre homologue étranger de ces signalements. Dans le passé, il y a eu des cas de suspension de l’adoption dans le pays mis en cause. Chargés des relations d’Etat à Etat, ou d’autorité centrale à autorité centrale, nous pouvons négocier ou renégocier les accords bilatéraux en matière d’adoption ».

Evidemment, cette année, Covid oblige, les missions ont été rares. En 2019, 8 pays ont été visités, Madagascar, Russie, Bulgarie, Kazakhstan, Colombie, Bolivie, Honduras et Congo Brazzaville. « Nous nous déplaçons aussi en Régions, 4 à 5 fois par an, pour rencontrer les services départementaux en charge de l’adoption internationale, répondre à leurs questions et leur apporter des informations ».

Denis Barbet reste optimiste pour 2021. Plusieurs déplacements, notamment dans des pays européens, sont prévus à partir de février. Et puis, 10 familles françaises attendent de pouvoir retrouver leurs enfants. Ce sont les « leurs », ils les ont déjà vus, « choisis », comme on dit dans le langage adoptif. Ils ont rêvé de les prendre dans leurs bras, de fonder une famille. Ils sont prêts à faire tous les sacrifices pour les rendre heureux. Ils ont déjà beaucoup attendu. Il faut, en moyenne de 2 à 5 ans (et parfois plus) pour aboutir après « un processus long et exigeant ».

Si vous envisagez une adoption internationale, rendez-vous sur www.diplomatie.gouv.fr/adopter-a-l-..., vous y trouverez tous les renseignements sur la MAI, une présentation du « Choix des pays d’origine », l’accompagnement obligatoire par un opérateur habilité par la MAI et accrédité par les autorités étrangères, les démarches à entreprendre.

Francine Boidevaix

mardi 13 avril 2021

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